Le regard de Chambaz

À la rencontre de Steve Marlet

"Je baigne dans le foot". C'est Steve Marlet qui le dit. Il n'est pas le seul mais, évidemment, le point de vue a davantage d'intérêt quand c'est lui qui le dit. Et à l'écouter, on comprend vite quelque chose de fondamental : c'est tout petit qu'il est tombé dans le bain. 

  Lui, le joueur par excellence du Red Star, commence à Pithiviers où il est né. Pithi­viers c'est d'abord le nom d'un gâteau – une pâte feuilletée à la crème d'amandes.  Son père est ouvrier « hautement qualifié » comme on disait, sa mère travaillait dans une usine de gâteaux et les enfants recevaient des gâteaux comme cadeau du C. E. avec un sapin de Noël et une colonie de vacances à la neige. Un oncle est dirigeant du CA Pithiviers et il va naturellement jouer au foot. A cinq ans, il est déjà très rapide et as­sez adroit et il fait très souvent la différence. A part le foot, il pratique un peu le judo et beaucoup l'athlétisme. Jusqu'à douze ans, c'est foot et athlétisme, un jour sur deux. On peut parier qu'il préfère la course de vitesse et le saut en longueur au lancer du poids et on ne s'étonnera pas de son admiration pour Carl Lewis. Au foot, il a un éducteur remarquable et marquant, Tétève, à savoir Monsieur Thévenin, un pas tout jeune, boiteux, auquel il témoigne beaucoup de respect. A l'école, il est plutôt bon élève, davantage attiré par les matières scientifiques, et il fait le nécessaire pour qu'on le laisse tranquille. Tout ce temps, il est fan de l'équipe pre­mière de Pithiviers – « les grands qui gagnaient », il porte les maillots de Saint-Etienne et du PSG que ses oncles lui offrent pour Noël et il préfère jouer plutôt que regarder les matchs à la télé­vision.

  A douze ans, il est détecté, bon pour le sports et études de Saint-Germain en Laye, en internat, ce qui forge le caractère et il en garde un bon souvenir. Mais l'internat coûte cher et une fracture du cinquième métatarse l'empêche de continuer. Il met alors le cap sur le « 93 » et habite Saint-De­nis. Il prend un bottin de téléphone et appelle les clubs. Bobigny l'accueille. Il y est recruté par le Red Star et il dispute le championnat de France cadets. Mais finalement il est refusé au centre de formation. Dévasté par cet échec, il n'a pas le temps de gam­berger. Ses qualités lui permettent d'intégrer l'équipe première. On est en février 1992. Il a tout juste dix-huit ans. 

  Pendant quatre ans, il connaît le bonheur au Red Star et au stade Bauer et il fait le bonheur du Red Star et du stade Bauer. Dès sa première année, il dispute un quart de fi­nale de coupe de France contre Cannes où évoluent les dénommés Zidane (dix-sept ans) et Fernandez (trente trois ans). A la longue, il habite Saint-Ouen, un temps rue Blanqui, au 7, en colocation, avec vue sur le stade depuis la fenêtre de la salle à man­ger.    

  La suite est  belle – une carrière riche, des grands clubs, trois grands championnats (France, Angleterre, Allemagne), des sélections en équipe de France, des titres. Au­jourd'hui le directeur sportif baigne plus que jamais dans le foot. 



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