TOURNAGE

Les licenciées du Lab reviennent sur le tournage du film En terrain libre


Entre avril et juillet dernier, les licenciées du Red Star Lab ont revêtu la casquette de réalisatrice et d'actrice dans le but de tourner un film intimiste, vrai, cash, qui apporte un regard nouveau sur le foot féminin. Accompagnées par Delphine et Marie, de l'association cinesphere, Élysée, Soraya, Djihan et Lauryn reviennent sur cette expérience inédite.

Lorsque Christelle Quillévéré, la responsable du Red Star Lab a parlé du projet aux filles, ces dernières ont tout de suite approuvé. « On était toutes très motivées à l’idée de réaliser un film de A à Z. Faire ce qu’on avait envie de faire, en ayant la possibilité de véhiculer un message, c’était une très belle opportunité », explique Lauryn.

Créola, Élysée, Lauryn et Naalya

Ce projet, lancé par Corinne, Delphine et Marie de l’association Cinésphère, avait pour but le thème des inégalités et des préjugés de genre dans le sport. « Nous avons eu envie de rencontrer des jeunes sportives mais avons été mises face à un constat : la quasi-absence de jeunes filles de plus de dix ans dans les espaces sportifs publics. Nous étions donc très heureuses de rencontrer les filles de l’équipe féminine du Red Star qui avaient, elles, franchi l’espace du stade. En les rencontrant plus, nous avons découvert que c’était là une forme d’engagement, de positionnement face au monde », raconte Corinne.

Delphine Moreau et Marie Famulicki, de l’association Cinésphère

Dès le début du tournage, les filles n’ont pas caché leur intérêt quant à l’écriture du scénario et au choix des différents rôles : « Certaines voulaient plutôt être actrices, d’autres ont préféré explorer leur voix et l’écriture de chansons, certaines se sont intéressées à la technique. Chacune a pu s’essayer aux différents postes artistiques et techniques », précise Delphine. « Le tournage a eu lieu entre avril 2019 et juillet 2019. Il y a eu deux temps de création collective intenses puis des temps de tournages individuels, notamment pour les entretiens. Certaines filles sont aussi venues à des étapes de montage et de post-production, étapes qui ont duré jusqu’en décembre 2019. »

Qui dit nouvelle expérience, dit forcément nouveaux usages, et non sans difficultés : « Certains moments étaient compliqués, notamment à cause de la fatigue et du fait de se dévoiler devant plusieurs personnes. Mentalement, c’est épuisant », confie Djihan. « On avait de grosses journées, mais cette aventure nous a toutes soudées. » Dans ce projet, un ingrédient important devait être ajouté afin de renforcer la saveur du film : il a été effectivement demandé aux filles de parler de leur passé. « Comme l’a dit Djihan, se dévoiler devant plusieurs personnes n’était pas facile. C’est très dur de s’ouvrir aux inconnus et de les laisser entrer dans notre jardin secret composé de nos pensées et idéaux. On avait peut-être peur qu’ils y apportent un jugement négatif », admet Élysée. Créola et Soraya sont elles allées un peu plus loin en invitant respectivement sur le lieu de tournage leur père et mère. « C’était la première fois que ma maman apparaissait dans un film », sourit Soraya. « Mais elle n’avait aucune appréhension. Elle tourne avec moi en m’accompagnant sur le terrain, me regarde jouer et me parle. C’est un moment très important pour moi car si je fais du foot aujourd’hui, c’est grâce à elle, qui m’a transmis sa passion. »

« J’ai été très ému. Je n’avais jamais vu ma fille sous cet angle »
Papa de Créola, Sénior F au Red Star

En tant que spectateur, le papa de Créola se dit très agréablement surpris de la prestation de sa fille : « J’ai été très ému. Je n’avais jamais vu ma fille sous cet angle. Cela m’a fait encore plus comprendre son engouement pour le foot, un sport que j’aime particulièrement moi aussi. Il a aussi été très intéressant de voir que des filles de leur âge parviennent à pointer du doigt un vrai problème de société. J’espère qu’elles seront entendues à travers ce film. »

« Les filles qui jouent au foot sont des garçons manqués, mais ce n’est pas vrai »
Lalim Boukada, responsable du recrutement des jeunes du Red Star

Lalim Boukada, responsable du recrutement des jeunes au club, ne cache pas son émotion : « Très souvent, on dit que les filles qui jouent au foot sont des garçons manqués. Mais non, ce n’est pas vrai. J’ai pris un réel plaisir : ce qu’ont montré les filles est vrai et sincère. J’ai été touché par leur charisme et par leur volonté d’exister à travers leurs paroles, malgré leur âge. J’ai été ému car c’était beau. Le lab, c’est plein de choses mais ça vous permet aussi de vous amener à ce genre de performance. C’était magnifique. »

En plus du jeu d’acteur, la chanson avait elle aussi son importance dans l’équation : « Au début, il nous a été compliqué de trouver les paroles des chansons », se souvient Djihan. « Mais l’équipe de tournage ainsi que Naaliya de par son inspiration, nous a été d’une grande aide. Évidemment, la timidé nous a vite gagnées car il a fallu chanter face aux garçons mais, étant timides eux aussi, la confiance nous regagnait peu à peu. »

Cependant, elles n’ont pu éviter le moment qu’elles craignaient toutes, à savoir le jour de la projection : « Ça fait très bizarre de se voir à l’écran. Il arrive qu’on ne se reconnaisse pas mais puisqu’on était plusieurs à être dans la même situation, c’était supportable. » (rires)

« On est unies sur et en dehors du terrain. »
Lauryn, Sénior F

Ce nouvel atelier du Lab aura, comme tous les autres ateliers, appris beaucoup de choses aux filles : « On a réalisé à quel point faire un film est dur », rit Lauryn. « C’est un métier très exigeant, on l’a compris en tournant des scènes qui n’ont pas été retenues et les moments de confidence. Mais ça été génial de participer à un tel projet. Concernant les filles qui voudraient faire du foot, elles peuvent comprendre à travers ce film que c’est un sport collectif et qu’on est une grande famille. On est unies sur et en dehors du terrain. » Et à Soyara d’enchérir : « On est unies et ça se voit sur le terrain ! Pendant les matches, on arrive maintenant à mieux se parler, on se comprend bien plus rapidement. L’impact qu’a eu cet atelier sur nous est incroyable ».

Élysée et Lauryn

« Le meilleur moyen de lutter contre quoique ce soit est de s’exprimer »
Élysée, Sénior F

Enfin, Élysée établit un constant unanime : « Cette expérience nous a appris que le meilleur moyen de lutter contre quoique ce soit est de s’exprimer. Ici, la parole était d’or. Il n’y avait aucune mauvaise réponse, chacune avait son histoire et ses idées. C’est grâce à ce genre d’oeuvres que les femmes se feront entendre ! Une femme qui fait du foot n’est pas un garçon manqué, tout simplement car le sport n’est pas dédié qu’aux garçons. Ce film documentaire est une bonne leçon de vie. »

De gauche à droite : Soraya, Naalya, Lauryn, Élysée, Lalim, Jessica et Créola
Assis : Hugo, Allan et Christelle

Par ailleurs, cette bonne leçon de vie sera à nouveau projetée le samedi 15 février 2020 de 14h à 16h à la Maison de Quartier du Landy, à Saint Ouen.

 

Crédit photos : Filippo Fabbri



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